Hier, c'était le printemps. À vrai dire, ce n'était qu'un mince
aperçu, une oasis perdue au milieu de l'hiver, comme venu pour nous narguer.
Hier, c'était le printemps et un feu de joie brûlait en mon cœur. On voyait les
gens heureux, on sentait l'air chaud sur notre peau et des bouts de gazon
criaient alléluia à la photosynthèse.
Hier, j'ai marché, longuement, sans pour
une fois ressentir l'envie de m'immoler vivant. Le soleil resplendissait de ses
jours les plus heureux, miroitant la flamme du plaisir le plus brut. Hier, c'était
le printemps. Et aujourd'hui ?
Aujourd'hui, l'oasis fut attaquée, brisée.
Ce n'était qu'un mirage au milieu du blizzard, notre envie extériorisée au
milieu de la grande dépression. J'ai réentendu les «j'ai hâte que ça soit
l'été» qui ont tant ponctué mes journées de décembre à février. J'ai revécu le
malaise.
Mais cet hiver-ci n'a pas été comme les
autres. Il m'a beaucoup appris, certes. Et je n'ai peur d'avouer d'en être
ressorti vainqueur. Car cet hiver, j'ai appris la nécessité d'être guerrier.
Oui, moi, être presque entièrement pacifiste, j'ai appris qu'à travers l'hiver
on ne peut se laisser marcher sur les pieds. Ou bien on se bat, et ainsi on
fait reculer la glace, ou bien on fige et on sombre. Et nous, peuple nordique,
sommes le reflet même de ce climat. Il faut combattre la mauvaise influence, la
réduire en morceaux et la détruire si l'on ne veut pas être détruit. Oui, j'ai
hâte qu'il soit été sur mon pays. Mais je sais aussi que de s'enfermer dans
cette nostalgie ne vient qu'accentuer le manque et la déprime. Bien des hivers
passeront encore et aussi bien des étés. Il va falloir, tôt ou tard, s'y
habituer. Ou alors mourir.
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